Bakari GUEYE

Le français est en voie d’extinction en Mauritanie

La langue de Molière, le français, n’a pas le vent en poupe en Mauritanie. Dans ce pays qui a donné du fil à retordre aux colons, la langue française est l’objet de toutes les récriminations, aussi bien de la part de l’élite que d’une population savamment montée contre elle.

Ce rejet trouve ses racines dans la lointaine histoire coloniale, avec l’imposition de cette langue dans un pays profondément musulman et peuplé d’habitants d’origines diverses. Du côté de la composante noire-africaine de la population, on s’accommode de la présence de cette langue. En revanche, pour les arabo-berbères, on continue de résister au français, perçue comme une manifestation intolérable de l’impérialisme linguistique.

Pour cette dernière frange de la population, qui soit dit en passant compte beaucoup de francophones, seule la langue arabe devrait être citée, car c’est la langue par excellence du Coran et de l’Islam. Ce positionnement de la population face au français ne lui rend guère service et constitue l’une des manifestations les plus éloquentes de la fracture communautaire dans ce pays.

Cette fracture est l’objet d’une récupération politique permanente, qui a poussé les gouvernements successifs depuis l’indépendance, en 1960, à mener une « guerre sécrète » contre le français, une guerre qui finira par se révéler au grand jour. Ainsi, depuis les premières années de l’indépendance, les dirigeants du pays se sont employés à modifier le système éducatif à la française en y introduisant une dose d’arabe. Cette tendance a conduit à une arabisation progressive, qui s’est traduite par une école à deux systèmes, avec le français pour les Mauritaniens d’origine africaine, et l’arabe pour la composante arabo-berbère.

Les francophones, une espèce en voie de disparition

Cette situation a aussi accentué la fracture communautaire, en créant deux types de citoyens dans un même pays. Malgré la tentative de fédérer les deux systèmes, à la faveur de la dernière réforme du système éducatif lancée en 1999, le fossé est toujours très grand. Cette réforme avait le mérite de revaloriser l’enseignement du français en ce sens, qu’elle avait décrété l’enseignement obligatoire des matières scientifiques en français exclusivement.

Malheureusement, cette initiative ne fit pas mouche. Les résistances au sein du système, noyauté par les arabisants, étaient les plus fortes et la volonté politique laissait également à désirer. Et, au moment où on décréta cette réforme, on continua à former les arabisants en masse. Par contre, les francophones, une espèce en voie de disparition, étaient recrutés au compte-gouttes.

C’est dire que la volonté de sabotage était manifeste. Cette réforme improvisée et inadaptée est toujours en vigueur mais aujourd’hui, l’enseignement du français dans les écoles mauritaniennes est si exécrable qu’on aura du mal à assurer la relève. Et dans les prochaines années, il va falloir se résoudre à importer des francophones.

Face à ce recul inquiétant du français en Mauritanie, ni les instances de la francophonie et encore moins la France ne remédient à cette situation. Au contraire, la France semble opter pour la restrictions de ses frontières, au nez et à la barbe des étudiants mauritaniens qui peinent à trouver un visa pour poursuivre leurs études dans les universités françaises. Avec ce contexte de plus en plus défavorable, on assiste à la descente aux enfers du français, dont les lampions s’éteignent lentement mais sûrement sous nos cieux.


Bakari Guèye


Mauritanie : les avocats français de l’ex-président Aziz reviennent à la charge

Les deux avocats français de l’ex président Aziz, Me Rajjou et Me Brigant, représentant le Collectif d’avocats de Brest, Paris et Marseille, sont revenus ce 3 octobre à la charge. Ils ont adressé une longue lettre au président Ghazwani, invité à intervenir en tant que garant de la constitution. L’objectif, mettre fin à la procédure contre leur client, une procédure jugée inconstitutionnelle.

La justice mauritanienne est-elle instrumentalisée ?

Cette lettre fait figure de diatribe contre la justice mauritanienne, qu’ils considèrent comme instrumentalisée. Les avocats estiment que leur client est victime : « De nombreux adversaires politiques se sont en effet manifestés pour tenter d’empêcher son retour et instrumentaliser le parlement. Ils ont notamment utilisé des prétextes fallacieux pour empêcher la libre expression politique des soutiens de l’ancien président et la mise en place d’une commission parlementaire pour lui nuire de manière partiale. » Et les avocats français d’enfoncer le clou en affirmant : « Cet acharnement s’est fait par le biais du Ministre de l’intérieur, jusqu’à interdire un parti politique, le PUDS, parti soutien à Monsieur Mohamed Ould Abdel Aziz. »

Les deux avocats français ont aussi qualifié l’interrogatoire du président Aziz « d’illégal ». Ils dénoncent aussi « le caractère inconstitutionnel des procédures et mesures coercitives concernant Monsieur Aziz ».

Les avocats français jettent à la poubelle toute la procédure en cours et haussent le ton. « Puisque la Constitution est violée et qu’aucun cadre légal ne peut justifier les agissements à l’encontre de notre client, nous accusons les responsables judiciaires en charge de ce dossier, ainsi qu’un certain nombre de responsables policiers de multiples infractions… Peu importe qu’ils se retranchent derrière une loi anti-corruption, puisque comme nous venons de le souligner elle est parfaitement inapplicable à l’ancien président Aziz. »

Débattre entre avocats français et mauritaniens

Aussi, les avocats s’étonnent. Dans une « République dotée d’une constitution et d’institutions juridiques sensément indépendantes et représentantes de l’ordre juridique, ils ressentent la nécessité impérieuse de recourir à l’intermédiaire d’une soixantaine de conseils pour la représenter. »

Tous ces avocats accusés de partialité sont traités comme des moins que rien. Selon eux, ils « ne parviennent pas à interpréter de manière stricte et intelligente la Constitution de Mauritanie. »

Erigeant leur client sur un piédestal, ils ont demandé au président Ghazwani d’autoriser un débat entre avocats français et mauritaniens. « Un débat loyal, juste et éclairé, pour que chaque citoyen puisse être informé de manière contradictoire de la situation actuelle. »

Des donneurs de leçons ?

L’arrogance, la suffisance et le mépris des représentants du Collectif des avocats français d’Aziz sont manifestes. Cette lettre, qui contient des menaces aux autorités mauritaniennes, sonne comme un ordre. Son style osé voire provocateur est plus qu’insultant.

On se rappelle de leur précédent passage à Nouakchott en août dernier. Les deux avocats auteurs de cette lettre avaient eu un comportement indigne d’hommes de droit, de surcroît venus de France. En effet, juste après leur débarquement à l’aéroport de Nouakchott, ils ont demandé à être reçu par le Procureur général de la Mauritanie. Ils l’ont par la suite menacé de le dénoncer auprès des autorités françaises, celui-ci ayant refusé de les « auditionner ».

D’ailleurs, un éminent avocat mauritanien formé en France et y enseignant le droit les avait remis à leur place.

Un peu plus d’un mois après cet épisode qui avait soulevé un tollé dans les milieux intellectuels, nos deux donneurs de leçons récidivent avec cette curieuse missive adressée au président Ghazwani.

Bakari Guèye


Mauritanie: Nominations en conseil des ministres : maintien du statu quo

Au cours du dernier conseil des ministres tenu ce jeudi les dizaines de nominations ont concerné essentiellement les membres d’une même communauté, ce qui a soulevé un tollé au niveau des réseaux sociaux où beaucoup de concitoyens se sont indignés de cette fuite en avant du pouvoir du président Mohamed Ould Cheikh El Ghazwani, qui persiste à emboiter le pas  à son prédécesseur dont le règne fut marqué par l’institutionnalisation d’un mode de gestion népotique et exclusionniste.

Cette politique a mené le pays au bord du précipice et il s’en est fallu de peu pour que la situation explose. Et durant la présidentielle qui s’est soldée par l’intronisation de Mr Ghazwani, on a frôlé le pire et il aura fallu la sagesse des candidats malheureux et notamment du plus populaire d’entre eux, pour éviter le pire. Et c’est justement ce même Birame qui, hier encore qualifiait le pays d’apartheid devant un parterre de représentants de la communauté internationale.

Il y a encore quelques jours le mouvement opéré au sein du ministère des affaires étrangères avait soulevé un tollé et un éminent diplomate qui a eu l’honnêteté et l’audace de dénoncer les injustices et les anomalies de ces promotions, a été purement et simplement relevé de ses fonctions.

Ces nominations dont certaines sont fantaisistes provoquent l’émoi au sein de la classe politique et de l’opinion publique. Et des voix s’élèvent même au sein de la majorité présidentielle pour dénoncer ces dérives et cette exclusion systématique de certaines franges de la communauté nationale.

Beaucoup comme cet éminent politicien trouvent cette dérive très gênante mais n’ont pas le courage de crier au scandale. Et pourtant il y va de l’intérêt de notre pays et de celui du président de la République dont le programme est fondé sur l’instauration de la justice et de l’égalité pour tous.

Cela demeure malheureusement un vœu pieux et il va falloir qu’il opère une véritable catharsis au sein de son entourage immédiat pour redresser la barre.

Les réseaux sociaux constituent aujourd’hui un véritable baromètre de la situation dans notre pays. Et au vu de ce bouillonnement, de ce déferlement de haine causé par l’injustice, il y a lieu de s’inquiéter en parant au plus pressé.

Voyez ce qui se passe actuellement aux Etats Unis, à Minneapolis, c’est le fruit de l’injustice et cela pourrait nous arriver aussi mais on a encore l’occasion de l’éviter.

Le président doit agir pendant qu’il est encore temps et éviter de tendre l’oreille aux va-t-en guerre et autres fossoyeurs de l’unité nationale.

Bakari Guèye


Editorial : L’opposition demande la tête des pontes de l’ancien régime

Faire du neuf avec du vieux, cela semble être la tendance du nouveau président mauritanien, Mohamed Ould Cheikh El Ghazwani, dont l’élection à la tête du pays en juin dernier avait suscité d’immenses espoirs, dans un pays durement éprouvé par une décennie de gestion autocratique de son prédécesseur.

La nomination des membres du gouvernement avait fait la part belle aux hommes de l’ancien régime, ce qui semblait tout à fait compréhensible car c’était justement grâce à l’appareil d’Etat et au parti au pouvoir, l’UPR, que Mr Ghazwani a pu réussir son forcing électoral. Ce renvoi de l’ascenseur était donc tout à fait justifiable et ce d’autant plus que le nouveau président ne s’était pas encore totalement affranchi de la gênante tutelle de son prédécesseur dont les partisans contrôlaient tous les leviers de commande de l’administration et de l’armée. Il fallait donc faire profil bas, le temps de bien s’installer et d’assurer ses arrières.

Cela n’avait pas pris beaucoup de temps et le président Ghazwani s’est imposé comme le seul maître à bord. Cela s’est traduit par le lâchage de l’ex président Aziz dont les déboires commençaient à faire la une de la presse mais aussi par la disparition des radars du parti UPR dont les dinosaures, pour la plupart compromis par leur manque de crédibilité, font profil bas.

Parallèlement, l’ouverture vers l’opposition a porté ses fruits. Les opposants les plus irréductibles ont accepté la main tendue du nouveau président qui, jusque-là n’a pas fait bon usage de cette union sacrée inimaginable il y a encore peu.

Malheureusement, le président Ghazwani est en train de gâcher cette belle occasion pour remettre le pays sur les rails et réconcilier les mauritaniens avec eux-mêmes.

Malgré un programme très ambitieux et le tintamarre orchestré autour de certains programmes dont on attend toujours l’impact sur la vie des populations, les mauritaniens attendent toujours le changement promis.

Ce changement aura-t-il lieu ? Rien n’est moins sûr comme le craint l’opposition, toutes tendances confondues qui, dans un communiqué conjoint en date du 26 mai exige le départ de tous les symboles de la gabegie au sein de l’administration. L’opposition apporte également tout son soutien à la commission d’enquête parlementaire qui doit faire la lumière sur le pillage des biens publics durant la dernière décennie.

Notons qu’une étude récente de la Banque Mondiale paru le 18 février 2020, sous la signature de Bob Rijkers, révèle que « 182 millions $ (environ 62 milliards ouguiyas anciennes) de la valeur de l’aide étrangère, ont été détournés sous forme de transferts effectués par des responsables mauritaniens vers des centres financiers offshore connus pour leur opacité et leur gestion privée de fortune, dont 150 million $ ont été placés dans des comptes bancaires et 32 ​​millions $ transférés dans des paradis fiscaux. »

Voilà qui devrait mettre la puce à l’oreille du président et l’inciter à écouter le conseil de l’opposition. Le mode de gouvernance est toujours le même et ce sont toujours les mêmes têtes qui pilotent le navire. De ce fait, on ne doit point se faire d’illusion, le résultat sera le même, voire pire.

Ainsi donc, une année après son accession au pouvoir, le président Ghazwani doit enfin opérer le virage à 180° tant attendu, faire table rase du passé sombre de son prédécesseur en mettant à l’écart les brebis galleuses et en mettant fin aux pratiques népotiques et mafieuses.

Ce n’est qu’à ce prix qu’il réussira à changer le cours des choses et qu’il pourrait éviter dans quatre ans de connaître le même sort peu enviable de son vieil ami.

Bakari Guèye


Mauritanie : Total appuie la vulgarisation de l’énergie solaire

Crédit photo: IM

La compagnie française Total vient d’octroyer à la Mauritanie une enveloppe de 5 millions de dollars destinés à appuyer des projets d’alimentation en énergie solaire des villes de Kiffa et Néma, deux grandes agglomérations de l’Est du pays.

Cette enveloppe a été l’objet de la signature d’une convention paraphée le 11 décembre à Nouakchott par le ministre mauritanien du Pétrole, de l’Énergie et des Mines, M. Mohamed Ould Abdel vettah et Mr. Guy Maurice, le directeur Afrique de Total.

La signature a eu lieu en marge de la 5ème édition de la conférence-exposition « Mauritanides » des Mines, du Pétrole et du Gaz dont les travaux ont pris fin le 12 décembre et qui a vu la participation de1500 participants, 100 exposants et 70 conférenciers de plus de 30 pays.

Cet appui financier permettra de renforcer les installations existantes dans ces deux villes et notamment Kiffa qui est en passe de disposer  d’une centrale électrique hybride qui sera fonctionnelle avant la fin de l’année. Ce projet clé en main (EPC), comprend une centrale solaire photovoltaïque de 1,3 MWc couplée à une centrale thermique de 5 MW. Elle sera la première du genre dans cette région d’Afrique occidentale.

Ce projet novateur est réalisé par VERGNET en partenariat avec ABC DIESEL.

Les deux partenaires s’étant donnés pour mission de fournir des solutions solaires photovoltaïques/thermiques hybrides.

Cette nouvelle centrale électrique hybride sera dotée du contrôleur en temps réel Hybrid Wizard™ développé par VERGNET qui garantira une pénétration maximale de la puissance photovoltaïque sur ce réseau électrique isolé et de faible capacité. Le système Hybrid Wizard™ intègre les conditions de production admissibles pour la nouvelle centrale thermique en termes de charge minimale et de gestion des réserves tournantes.

Le parc solaire photovoltaïque fournira à la population plus de 2 000 MWh par an d’énergie renouvelable et économisera 400 000 litres de combustible par an

Le partenariat unique avec ABC DIESEL permet de fournir à la Mauritanie une solution d’énergie renouvelable de pointe, la première du genre dans cette région.

Notons qu’en Mauritanie, près des deux tiers de la population, ne bénéficient d’aucun accès à l’énergie moderne. De ce fait, depuis quelques années les autorités ont mis en place des projets d’électrification rurale décentralisée pour les villages isolés à travers des plates-formes d’énergie solaire.

Bakari Guèye


Mauritanie : Bilan mitigé du président Aziz

Après 10 ans de règne sans partage, le bilan du président Mohamed Ould Abdel Aziz est mitigé. Certes, des pas ont été faits dans le bon sens, notamment sur le plan sécuritaire la mise sur pied d’une armée relativement performante qui a réussi à sécuriser les frontières du pays dans une région minée par le terrorisme, le trafic transfrontalier et le crime organisé.

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Crédit photo : Magharebia, Jemal Oumar. [CC BY 2.0], via Wikimedia Commons
Cette prouesse mauritanienne est devenue un cas d’école et ce n’est pas un hasard si cette expertise est reconnue par les pays de la région sahélienne qui ont fait confiance à la Mauritanie, qui mène la danse au niveau du G5 Sahel. L’organisation suscite aujourd’hui l’intérêt du monde entier ; voilà à mon avis la principale réalisation du président Aziz.

Pour le reste, les choses sont beaucoup moins reluisantes. Et pourtant au cours de ces deux mandats, la situation économique était très favorable, avec la hausse très importante des cours du fer qui a généré des bénéfices énormes pour la Mauritanie.

La gestion de cette manne ne semble pas avoir été aussi efficace qu’on veut nous le faire croire.

Certes, des infrastructures ont été érigées ça et là, des ouvrages importants ont été construits ou démarrés tels que l’aéroport Oumtounsi, des mégaprojets pour l’alimentation en eau de la capitale et de l’Est du pays -l’Afout Essahli et l’Aftout Echergui -, le nouveau palais des congrès pour ne citer que ceux là. Il s’agit d’importants projets structurants qui ont eu un impact incontestable sur la vie des populations ; mais là où le bat blesse c’est la façon dont ont été octroyés et gérés tous ces projets et les centaines d’autres qui ont été passés par le régime du gré à gré qui comme on le sait est en porte-à-faux avec les règles les plus élémentaires de la transparence.

D’autres anomalies sont à mettre sur le compte du bilan économique du président Aziz, tel que la domestication des hommes d’affaires qui se devaient de s’aligner sur le pouvoir ou disparaître. Cette situation a eu des effets néfastes sur l’économie et sur la crédibilité de la justice, et elle a agi de manière négative sur les investisseurs nationaux et étrangers.

Ce n’est donc pas un hasard si le dernier rapport du World Economic Forum publié récemment la Mauritanie est classée à la 137ème place sur 138 pays sélectionnés en termes de compétitivité économique.

Voilà qui résume à peu près ce bilan économique.

Il suffit de jeter un coup d’œil sur la situation peu enviable du consommateur mauritanien pour s’en convaincre. En effet, au cours des deux mandats écoulés, les prix n’ont cessé de flamber et le pouvoir d’achat des mauritaniens s’est réduit comme une peau de chagrin. Aujourd’hui, même les mauritaniens de la classe moyenne tirent le diable par la queue. Pour les autres, c’est-à-dire la majorité du peuple, la situation devient de plus en plus intenable.

Un rapport de l’ONU présenté à la 35e session du Conseil des droits de l’homme de l’ONU qui s’est tenue du 6 au 23 juin, le fameux rapport Alston, a indiqué que les trois quarts de la population mauritanienne vivent « dans un état de pauvreté multidimensionnelle ou dans un état proche ».

L’homme étant la fin de tout développement, on peut considérer vu la situation économique extrêmement difficile que le bilan du président Aziz est en dessous de la moyenne.

Autre échec non moins patent, c’est celui enregistré dans le domaine de l’éducation où malgré les importants investissements effectués et la volonté de façade de remettre l’école mauritanienne sur les rails, la situation est allée de mal en pis.

Les prestations des services chargés de l’éducation ne sont pas à la hauteur et l’école publique continue à se débattre dans ce coma profond qui n’a que trop duré, en attendant un hypothétique sauveur.

Bakari Guèye


Visite de Ben Salman en Mauritanie : Consolidation de la coopération économique

Crédit photo: AFP

Le Prince héritier de l’Arabie Saoudite, l’Emir Mohamed Ben Selmane a effectué ce dimanche 02 décembre une visite de travail en Mauritanie, visite marquée par la signature entre les deux pays d’importants accords de coopération.

On notera d’emblée la construction dans la capitale mauritanienne d’un important complexe hospitalier dénommé « Hôpital du Roi Selmane Ibn Abdel Aziz ».Avec une capacité de 300 lits, ce sera le plus grand centre hospitalier du pays.

L’annonce a été faite par le ministre saoudien de l’information M. Awad Al Awad qui fait partie de la délégation royale.

Cet hôpital viendra renforcer les infrastructures hospitalières existantes et permettra de renforcer la couverture médicale dans une ville qui croit à un rythme exponentiel et où la demande de soins est en progression constante.

Parmi les autres accords signés à l’occasion de cette visite-éclair il convient de noter une convention portant sur l’exonération de la double imposition sur le revenu et sur le capital et sur l’exemption  fiscale.

Par ailleurs des protocoles d’accords dans les domaines de l’hydraulique et de l’environnement ont été paraphés par les ministres concernés.

Ainsi donc l’Arabie saoudite consolide sa position de premier partenaire économique et premier investisseur en Mauritanie avec le financement de grands projets structurants à coups de milliards d’ouguiyas.

C’est ainsi qu’en août 2017, le Fonds Saoudien pour le Développement (FSD) avait octroyé à la Mauritanie une enveloppe de 135 millions de dollars américains pour l’exécution d’importants projets dont celui de l’interconnexion électrique entre Nouakchott et Zouerate par la construction d’une ligne électrique de 225 KV passant par les villes d’Akjoujt et d’Atar ; le projet de construction de la route reliant la route nationale n°1 (Nouakchott-Akjoujt) Benichab et la route nationale n°4 (Nouakchott-Nouadhibou) ; et également le projet d’extension et de réhabilitation du Canal Koundi afin d’augmenter le débit d’eau du fleuve.

Ainsi, depuis bientôt quatre décennies, le royaume wahabite n’a de cesse d’injecter d’importants investissements en Mauritanie où pas moins de 38 projets ont été financés grâce à des prêts concessionnels.

Cet appui saoudien s’est avéré décisif dans la mise en place des infrastructures de développement et à un meilleur arrimage du pays à l’économie mondiale.

Bakari Guèye


Mauritanie/Droits de l’homme : Un élu du peuple malmené

Crédit photo: C I

Le député Birame Dah Abeid, président du mouvement IRA pour la lutte contre l’esclavage et bête noire du régime mauritanien croupit en prison depuis plusieurs mois pour une plainte pour diffamation, déposé contre lui par un journaliste.

Le député qui est en détention préventive depuis le 7 août dernier a été évacué ce lundi matin à l’hôpital suite à un malaise cardiaque. Mr Birame est apparu menotté et encadré de près par des éléments de la garde nationale.

Ces images ont soulevé un grand tollé au sein de la classe politique et de l’opinion publique mauritanienne qui ne comprennent pas pourquoi tant d’acharnement contre un député jouissant de l’immunité parlementaire.

Au cours d’un premier face à face avec le juge d’instruction, ce dernier demanda à Birame s’il était prêt à présenter ses excuses au plaignant qu’il avait accusé d’être un agent au service des renseignements de l’Etat, il répondit non, ce qui justifierait son maintien en prison et sa privation d’un procès équitable.

Contrairement à ses collègues, le député en détention est privé de ses salaires.

Ce n’est pas la première fois que Mr Birame est envoyé au bagne. C’est un habitué des prisons mauritaniennes dont il demeure l’un des plus fidèles abonnés.

En effet, l’homme dérange par son combat virulent contre l’esclavage en Mauritanie et au fil des ans il n’a cessé de monter en grade et de gagner des galons, devenant du coup une menace incontestable pour l’establishment et le système en place en Mauritanie.

Candidat à la dernière élection présidentielle, il réalisa un score conséquent malgré les anomalies qui avaient entouré le scrutin.

Et à l’occasion des récentes élections générales en Mauritanie, son alliance avec le parti nationaliste SAWAB a fait mouche car non seulement Birame a pu décrocher son fauteuil à l’Assemblée Nationale, et ce malgré le fait qu’il soit en prison, mais ce parti qui n’avait jusque là pas pu avoir des élus au Parlement a gagné plusieurs sièges grâce à l’électorat du militant anti-esclavagiste.

Il y a lieu de noter par ailleurs que Mr Birame jouit d’un vaste soutien international allant du Congrès américain au Parlement européen en passant par les organisations africaines et internationales les plus en vue dans le domaine de la lutte en faveur des Droits de l’Homme, c’est dire que les autorités mauritaniennes ont été très mal inspirées en s’octroyant cette mauvaises publicité avec à la clef des images aussi choquantes et à la limite de l’indécence.

Il s’agit là d’une erreur monumentale, qui révèle au grand jour l’amateurisme des services chargés de la communication au sein du pouvoir mauritanien.

Cette bavure médiatique est d’autant plus inacceptable que le régime mauritanien vient d’être épinglé par le Congrès américain qui a retiré à la Mauritanie le régime préférentiel accordé à certains pays dans le cadre de l’AGOA.

Cette exclusion est motivée par un recul dans le domaine de la lutte contre l’esclavage héréditaire.

C’est dire que le traitement réservé au porte étendard de la lutte contre l’esclavage en Mauritanie, ne va pas arranger les choses.

Bakari Guèye

 

 


Mauritanie : une presse qui se cherche toujours

Crédit photo: Alakhbar

Le rôle des médias n’est plus à démontrer. Ils peuvent être des vecteurs de développement s’ils sont soutenus et bien encadrés, ce qui n’est malheureusement pas le cas dans notre pays, la Mauritanie.

 

Aujourd’hui, la presse mauritanienne est dans un piteux état. Née seulement à la fin du siècle dernier, la presse privée, qui est censée être la plus intéressante, est malheureusement dans un piteux état. Elle a fini par creuser sa tombe et aujourd’hui, les rares titres qui continuent à paraître épisodiquement sont à l’agonie.

Aujourd’hui, la presse  écrite a été supplantée par la presse électronique, qui comprend un conglomérat de sites aussi farfelus et aussi peu crédibles les uns que les autres. Cette presse fait face à un manque cruel de journalistes ou de personnel qualifié, et les règles les plus élémentaires de la profession sont foulées au pied.

Cette médiocrité et cette pagaille généralisée est savamment entretenu par les autorités qui ne souhaitent apparemment pas l’émergence d’une corporation professionnelle et d’un journalisme d’investigation qui feraient des dégâts, dans un pays où les scandales sont légion et où cette presse pourrait trouver un terreau très fertile.

Nos autorités semblent donc avoir opté pour une clochardisation de la presse, d’où la prolifération des organes de toute sorte, des organes parfois tenus par d’illustres cancres.

Et le comble, c’est que les autorités sont plus enclines à traiter avec cette presse de pacotille qu’avec les rares organes jugés plus ou moins sérieux.

La libéralisation de l’espace audiovisuel, avec l’apparition de radios et de télévisions privés, a constitué un grand pas en avant. Seulement, ces nouveaux-nés n’ont pas été accompagnés et soutenus comme il se doit par l’État, qui a très vite eu peur de leur capacité de nuisance à ses intérêts. Ces médias bénéficiaient d’une audience beaucoup plus large comparativement à la presse écrite et électronique et les citoyens ordinaires y avaient accès car on y parlait toutes les langues locales, on avait pas besoin d’avoir été à l’école pour profiter de leurs programmes.

Ainsi donc, avec leur liberté de ton, la variété des sujets traités, car aucun sujet n’était tabou, mais aussi les débats politiques qu’ils organisent, ces médias se sont tout de suite distingués… mettant du coup la puce à l’oreille d’un pouvoir politique qui ne supporte pas trop la contradiction. Très vite, ce dernier va leur mettre des bâtons dans les roues. De ce fait, ces médias sont pratiquement sous embargo et le couperet du pouvoir plane toujours sur leur tête telle une épée de Damoclès.

Et pour vous donner une idée de la précarité dans laquelle se trouve la presse mauritanienne, les journalistes travaillent sans contrat et ne disposent d’aucune garantie, ce qui bien entendu est en contradiction flagrante avec la loi. La plupart travaillent sans salaire et s’il existe, il est réduit à portion congrue et généralement payé de manière très irrégulière ou pas payé du tout.

C’est vous dire qu’il s’agit d’un secteur moribond qui ne pourrait nous mener nulle part.

Du côté de la presse publique, la situation n’est guère meilleure. La production journalistique est quasi inexistante et les programmes radiotélévisés sont d’une pauvreté effarante. Et ce, malgré le fait que ces médias disposent de tous les moyens nécessaires, contrairement aux médias privées.

C’est ainsi qu’en allant sur la radio nationale ou sur la télévision nationale, vous avez 9 chances sur 10 de tomber sur un groupe musical ou poétique. Et c’est malheureusement à ça que se réduisent les programmes de ces médias de service public.

Donc ces médias sont loin de jouer leur rôle et pourtant ils auraient dû être des outils de développement… un vrai gâchis.

 

Quelles solutions ?

 

Il serait donc urgent d’étudier les propositions appropriées pour une sortie de crise. Je pense qu’il va falloir tout d’abord une volonté politique réelle. Cette volonté politique est la condition sine qua none d’un redressement salvateur. Malheureusement, cette volonté politique bat de l’aile et la dernière initiative en date le prouve. Des journées de réflexion ont été organisées avec la bénédiction des autorités mais les recommandations dorment toujours dans les tiroirs gouvernementaux.

Le fait que le pouvoir, par le biais du président de la République, s’adresse à la presse en disant aux journalistes « c’est à vous de vous organiser » prouve le peu de sérieux accordé à ces velléités de changement.

Comment la presse mauritanienne, qui est une véritable écurie d’Augias, peut-elle s’organiser quand on sait comment elle est constituée ?

Des journaux et autres sites électroniques cartables ne disposent d’aucune ressource humaine, ou même de ressource tout court.

Ainsi la Haute autorité de la presse et de l’audiovisuel (HAPA), qui demeure jusque là une coquille vide, doit enfin jouer son rôle de gendarme et de régulateur de la presse en exigeant des institutions de presse, aussi bien publiques que privées, un respect scrupuleux des cahiers des charges.

Il est urgent de donner un coup de pied dans la fourmilière, en sévissant contre cette kyrielle de sites électroniques nuisibles et dangereux qui ternissent l’image de notre presse. Cela devrait être fait sans état d’âme et pour le bien commun.

Il est également impératif d’accorder plus d’intérêt à la formation des journalistes et de trouver une solution à la difficulté de renouvellement des professionnels au niveau de la presse francophone, qui se meurt faute de ressources humaines valables.

Voilà, ce sont là quelques pistes de réflexion qui pourraient nous aider à redonner au secteur de la presse ses lettres de noblesse.

Bakari Guèye


Mauritanie/Gouvernement : On prend les mêmes et on recommence !

Crédit photo: AMI

Le chambardement tant souhaité n’aura finalement pas lieu et la liste des membres du nouveau gouvernement qui vient d’être rendue publique par la Présidence ne compte que trois nouvelles têtes ou même deux seulement car le nouveau porte-parole du gouvernement qui n’est autre que le président du parti au pouvoir, ne fait que retrouver un poste qu’il avait occupé en 2014 .

Apparemment, le premier ministre fraîchement propulsé à la tête du gouvernement a eu les instructions de faire du neuf avec du vieux.

Du côté des sortants, on notera le départ des ministres de la défense et celle de la fonction publique, deux grosses pointures considérées comme fidèles parmi les fidèles du président de la République.

Monsieur Diallo Mamadou Bathia devrait certainement faire valoir ses droits à la retraite ; une grande perte pour le pouvoir du président Aziz qui perd en cet énarque, l’un des meilleurs technocrates de la République, un commis de l’Etat d’une qualité très rare.

Idem pour Mme Coumba Bâ, une ministre de qualité qui a été souvent pressentie pour effectuer des missions difficiles.

Départ également de Mr Ould Oudaa, ex ministre de l’équipement et des transports, un autre fidèle du chef de l’Etat qui serait emporté dit-on par ses contreperformances au niveau politique dans son Brakna natal.

Quant à Mr Mohamed Ould Cheikh Sidiya, l’ex ministre secrétaire Général de la présidence, son départ n’a pas surpris car depuis sa nomination il y a juste quelques mois, il a brillé par son effacement, ayant apparemment du mal à évoluer dans les arcanes de la haute administration.

De son côté, le tonitruant ex porte parole du gouvernement, Mr Mohamed Lemine Ould Cheikh, il paie apparemment pour ses sorties médiatiques enflammés et rocambolesques, un excès de zèle qui a porté plus d’une fois un grand tort à l’action gouvernementale.

Ce remaniement en apparence sans grande envergure consacre pourtant une redistribution des cartes en perspective de la présidentielle de 2019. D’abord l’éviction de l’ex premier ministre Ould Hademine, casé à la présidence comme ministre d’Etat chargé de mission, un titre pompeux à première vue mais un ministre sans portefeuille ; une maigre consolation pour cet homme qui, en perdant son poste stratégique voit ses ambitions totalement compromises.

Autre nouveauté, la nomination du Général de division Ghazouani, ministre de la défense nationale. Depuis plusieurs années, ce poste était la chasse gardée des civils, c’est pourquoi il y a lieu de penser que ce changement de cap n’est pas gratuit. L’homme qui est dans l’antichambre de la retraite est présenté comme l’un des potentiels successeurs du président Aziz. C’est donc à croire qu’il profitera de ce poste hautement stratégique pour mieux se préparer à une éventuelle conquête du pouvoir.

Bakari Guèye